Des Fake news, il y en a partout. Mais qu’est-ce vraiment qu’une fakenews et comment les reconnaître ?

Fake news, faits alternatifs, erratum, post-vérité, intox… entre tous ces mots on s’y perd. Demandez aux participants une définition de fake news ainsi que quelques exemples de fake news qu’ils auraient pu entendre. Après ce premier état des lieux, proposez cette classification : fake news est un mot valise qui regroupe plusieurs choses. Ce peut être :

• Une fausse information ou “infox”. Une fake news c’est plus qu’une fausse nouvelle. C’est une fausse information fabriquée dans un but de propagande ou de désinformation. Cette fausse information vise à défavoriser un parti politique, à entacher la réputation d’une personnalité ou d’une entreprise, ou à contrer une vérité scientifique établie par exemple. Elle est volontairement manipulée.
• Une information “orientée”, biaisée. C’est une information vraie mais présentée de telle manière qu’elle est interprétée dans un sens qui arrange l’éditeur
• Une information fausse ou très exagérée destinée à générer du clic. Nous avons créé une fiche spécifiquement dédiée à cette stratégie, les pièges à clics, qu’on vous invite à consulter !
• Un canular. Il s’agit d’une imposture d’ordre comique perpétrée dans l’intention de tromper ou de faire réagir celui qui en est la cible.
• Un erratum. C’est une fausse information..involontaire. Le média la corrige dans un erratum quand il s’en rend compte ou qu’on le lui signale.

Dessinez au tableau cette classification. Tracez cinq colonnes et donnez pour en tête à chaque colonne les termes ci-dessus. Ce tableau vous servira pour le quizz que vous allez lancez maintenant.

Organisez le groupe en plusieurs équipes. Vous allez projeter des images, des vidéos de comptes de réseaux sociaux et les groupes devront dire s’il s’agit d’une vraie information, d’une infox (fake news), d’un piège à clics, d’une information orientée ou d’un canular ? Posez la question, laissez -les débattre un peu puis donnez la réponse avec l’explication après chaque question. Vous classerez alors dans le tableau dessiné au préalable chaque fake news du quizz.

Un peu de contexte. Nous sommes au mois de juin 2024, en pleine période électorale pour les Législatives en France. Le Rassemblement national a fait une percée fulgurante lors des Législatives européennes. Cette photo d’une femme voilée qui brûle un drapeau a été vu sur Tiktok plus de 80 000 fois. Des internautes, choqués, relaient et commentent, comme ici : “Après on s’étonne que [le] peuple votre RN”. Cette information est-elle vraie ? Ou est-ce un canular, une fausse information, une publication orientée, ou un piège à clics ?

Réponse : C’est une intox ! L’image, tirée d’une vidéo est réelle mais a été complètement détournée de son contexte. Si vous faites une recherche par image inversée (Voir la Fiche ), vous pouvez trouver la vidéo associée. En réalité, cette image est tirée d’un reportage réalisée par le média marocain Tanjanews. Les faits ont lieu en octobre 2023 à propos d’une manifestation devant le consulat de France à Tanger “pour protester contre le soutien de la France à Israël”.

Plus d’informations grâce au décryptage du service Les Observateurs de France24.

Contexte : Sur X (ex-Twitter), des images de Donald Trump en pleine arrestation circulent. L’une de ces images est vue plus de 4 millions de fois. Nous sommes en mars 2023, et à ce moment-là les médias américains relatent la possible inculpation pénale de l’ancien président américain. Il aurait payé l’actrice de films pornographiques Stormy Daniels, avec qui ils aurait eu une liaison, pour qu’elle se taise. Tout cela avec les fonds de sa campagne de 2016…campagne à l’issue de laquelle il est devenu président des Etats-Unis.

Réponse : En réalité, ces images sont fausses et ont été réalisées très facilement avec l’intelligence artificielle Midjourney. D’autres images ont buzzé, comme Donald Trump en combinaison orange en prison, ou dans un autre style, le Pape François swag en doudoune blanche Balenciaga ou Emmanuel Macron en éboueur. L’intelligence artificielle crée des images de plus en plus réalistes qui interrogent sur la manipulation de l’information. D’où l’importance de toujours vérifier le contexte et la source.

Plus d’informations avec cet article de France Inter.

Cet article du site Sputnik France une jeune fille retrouve l’ouïe grâce à une oreille implantée… sur son bras.

Vraie information, infox, piège à clics, information orientée ou canular ?

Donnez quelques éléments de réponses aux groupes : Sputnik était une agence de presse multimédia internationale lancée officiellement par le gouvernement russe en 2014. Cette agence dépendant de l’État russe se propose d’apporter « un regard russe sur l’actualité ».

Réponse : nous sommes typiquement ici dans un cas d’information orientée. Le titre, racoleur, ne reflète pas le contenu de l’article. Si on lit l’article en entier on apprend en effet qu’aux États-Unis une jeune fille a recouvré l’ouïe mais contrairement à ce que le titre laisse supposer, ce n’est pas en lui implantant une oreille dans le bras. Son oreille lui a été implantée au bon endroit, mais en effet, pour faire prendre la greffe, du cartilage a été au préalable implanté dans son bras afin que les vaisseaux sanguins repoussent. En lisant le titre de l’article on a l’impression que la jeune fille a désormais une oreille implantée dans le bras et ressemble à un espèce de monstre.

Posez la question aux participants : “à votre avis, quel est l’intérêt de Sputnik de titrer ainsi cet article ?”.

Plusieurs hypothèses :

• faire du clic, on est tout à fait dans un titre piège à clic (cf atelier piège à clics)
• dégrader l’image des États-Unis, ce pays monstrueux où on implante des oreilles dans les bras.

Probablement un peu des deux. En tout cas l’information est clairement orientée

Les journaux papiers publient régulièrement des erratum. Affichez cet article du Monde (un vieil erratum des années 1970) dans lequel on peut lire : “Dans la carte des abstentions du 5 mai 1974 publiée dans nos dernières éditions (le Monde du 28 avril, page 5), les deux départements de la Corse devraient figurer dans la tranche des plus de 20 %”.

Vraie information, infox, piège à clics, information orientée ou canular ?

Réponse : comme le titre l’indique, c’est un erratum, c’est à dire que l’article comportait une erreur involontaire. Celle-ci a été modifiée par la suite. Les médias font des erreurs régulièrement mais les corrigent avec ce qu’on appelle des erratum. Il y en a des centaines.

Vladimir Poutine a été réélu en tant que président de la Fédération de Russie en mars 2024 avec un score record, laissant de nouveau plané le doute sur la transparence de cette élection.

Trumps congratulates Putin on "Landslide Victory' Hours before polls open.

Vraie information, infox, piège à clics, information orientée ou canular ? Évidemment, on sait désormais que c’est faux. C’est un canular. Le Burrard Street Journal est un journal satyrique canadien basé à Vancouver. Cependant de nombreuses publications de ce journal ont été prises comme vraies surtout lors des campagnes électorales.

À l’époque du débat sur la loi pour le mariage pour tous, lors du débat sur la procréation médicalement assistée, Christine Boutin, femme politique fermement opposée au mariage pour tous, a repris les mots du gouvernement pour le discréditer. Elle déclare dans cette vidéo :

Le gouvernement refuse de parler de “recul” mais de “stratégie provisoire d’avancement à potentialité différée”

Vraie information, infox, piège à clics, information orientée ou canular ?

La phrase est tellement alambiquée qu’elle est incompréhensible. C’est un canular dans lequel Christine Boutin est tombée. En direct sur BFM TV, elle a repris cette soit disant formule officielle pour insister sur les hésitations du gouvernement de l’époque et s’est couverte de ridicule. C’est bel et bien le Gorafi (journal satyrique français) qui a publié ce canular.

Ouvrez le débat et demandez aux participants depuis combien de temps les fake news existent. Les fake news sont-elles vraiment un phénomène nouveau ?

En réalité, si le terme fake news est assez récent, la propagation volontaire de fausses nouvelles est connue depuis au moins 2500 ans. Le terme s’est popularisé lors de la campagne électorale de 2016 qui opposait Donald Trump et Hillary Clinton. Depuis, tout ce qui ne va pas dans le sens de Donald Trump est qualifié par ce dernier de Fake news.

• Commencez par donner quelques “vieux” exemples de fake news.

Pour vous inspirez, voici quelques anecdotes ! La manipulation de l’information existe depuis bien plus longtemps été utilisé. Remontons au VIe siècle, en Chine. Le général Sun Tzu dédie une partie de son célèbre ouvrage L’Art de la guerre à la manipulation de l’information, autrement dit la propagande, pour gagner ses batailles. Il y explique le nécessaire et subtil équilibre entre vérité et mensonge, et les choix stratégiques des personnes qui font l’objets de ces inforations biaisées. Les fausses nouvelles sont une arme de guerre. De la première guerre mondiale à la guerre en Ukraine d’aujourd’hui, les exemples sont infinis !

Un autre exemple ? Au Moyen-Âge, l’un des mythes les plus répandus est l’empoisonnement par les Juifs des puits d’eaux potables. Ces rumeurs surgissaient d’autant plus lors d’épisodes de famines, justifiant de voler, de piller ou de s’exonérer de dettes auprès des familles juives.

Revenons au XXIe siècle. Il y a eu beaucoup de fake news avec le 11 septembre, pendant le mouvement des gilets jaunes et avec le Covid-19. Sans compter chaque campagne électorale !

• Demandez aux participants d’en donner à leur tour !

Parmi les exemples il y a les bons vieux hoax dont vous pouvez obtenir un échantillon sur Hoax Buster, un site collaboratif spécialisé dans la vérification des rumeurs circulant sur internet. Avant l’apparition des réseaux sociaux, les fakenews circulaient beaucoup par mail. À son lancement, Hoax Buster traquait principalement les canulars dans des chaînes d’e-mails. Depuis sa création, son activité n’a cessé d’augmenter, notamment avec l’émergence des réseaux sociaux.

Mais aujourd’hui, il y a surtout les cellules dédiées au fact-checking au sein des médias. Vous avez par exemple : Decodex du Monde, Les Révélateurs de France Télévisions, Checknews de Libération, Les Révélateurs de TF1, etc.

Attention, lancer une discussion sur ce sujet peut être intéressant mais c’est aussi un terrain glissant. Selon l’âge des participants vous pouvez facilement basculer dans des discussions complotistes et conspirationnistes. Dans ce cas ne niez pas formellement les théories, ça ne fera pas avancer la discussion. Demandez plutôt à ceux qui pensent qu’elles existent de l’expliquer, de chercher d’où vient cette théorie, qui l’a lancée et quel peut être l’intérêt de la personne à l’origine de cette théorie. Ce peut être un bon lien avec l’atelier fact-checking.

Expliquez ce qui se cache derrière le terme fourre-tout fakenews est un enjeu politique et démocratique. En France, ce terme est désormais largement utilisé par les cercles d’extrême droite. Pour comprendre et combattre la désinformation il est important de connaître les multiples réalités recouvertes par ce terme.